Les secrets d’une stratégie de fidélisation réussie, les bons conseils pour adresser les bons messages à la communauté de consommateurs et les erreurs à éviter par toute entreprise… Le sujet était au cœur d’un débat à bâtons rompus, lors de la rencontre de ce mois du « Cercle des ÉCO ».
Crise sanitaire, quel impact ?
Mais, au-delà du digital, le nouveau mode de consommation, désormais axé sur le critère de la responsabilité sociale et environnementale, s’impose également davantage. «Aujourd’hui, par exemple, on consomme plus green et les générations à venir seront de plus en plus sensibles à cela», ajoute Hajji. De son côté, le Directeur du Pôle commercial, marketing et communication externe chez Wafasalaf, Driss Feddoul, explique que la transformation du marché était inévitable. «La crise n’a fait qu’accélérer la montée du digital, afin de permettre de servir le client de manière plus rapide et plus efficace», affirme-t-il. Mais ce n’est pas tout, souligne Driss Feddoul, car la crise de la Covid-19 a permis de prendre conscience de l’impact d’une meilleure connaissance du client, d’où l’importance de la data. «La dimension de la donnée va faire la différence dans de nombreux secteurs, dans la mesure où il s’agit plus que jamais de proposer la bonne offre au bon client, dans le bon timing et via le bon canal», ajoute-t-il.
Un challenge qui ne peut être réussi qu’en construisant une approche data, ambitieuse, structurée, et bien menée à l’échelle de l’entreprise, défend l’expert en stratégie commerciale et marketing. La digitalisation n’est plus une option, affirme de son côté Zineb Tadili, Directrice Costumer & shopper expérience chez Orange. Mais, justement, cette digitalisation s’accompagne nécessairement par l’instantanéité, par la personnalisation des parcours et les offres, mais surtout par l’ouverture sur les réseaux sociaux, tient à préciser la Directrice en charge de la Costumer & shopper expérience chez Orange. «Aujourd’hui, il ne suffit plus d’annoncer dans une publicité que l’on est les meilleurs, les moins chers et les plus efficaces dans notre domaine. Il faut surtout le prouver !», dit Zineb Tadili. Car, ajoute l’experte, c’est cette viralité de l’expérience client, la rapidité de la transmission du ressenti du consommateur qui rend très importante la sensibilité d’une entreprise à l’enjeu de l’écoute client. «Notre vision du marché est très factuelle et nous permet d’observer l’évolution de l’utilisation des canaux, celle de la performance en termes de qualité de service. Il y a une dizaine d’années, les entreprises avaient encore du mal à rapprocher le discours de la réalité. Aujourd’hui, les choses changent», commente à son tour Ghali Kettani, Directeur associé du «Elu service client de l’année Maroc». Il appuie, par ailleurs, le constat des autres intervenants au sujet des opportunités nées sous la Covid. Au départ, la situation semblait inquiétante, rappelle-il, mettant en avant l’un des constats de l’Observatoire marocain du service client, selon lequel le face à face reste l’un des canaux de liaison préférés des consommateurs. «Cette crise a fait jaillir des choses extraordinaires chez les entreprises marocaines», affirme Kettani, au sujet de la rapide translation des clients vers le digital à l’avènement de la pandémie.
Stratégies de fidélisation des entreprises. «Savoir remercier ses clients», une valeur clé ?
Parmi les conseils les plus fréquents formulés pour fidéliser une communauté de consommateurs, les experts préconisent qu’une entreprise sache remercier ses clients, voire s’excuser quand il le faut. Or, ces pratiques sont loin d’être monnaie courante sur le marché. Cet aspect a été débattu par les quatre invités. Afin de démontrer l’importance du « mea culpa », quand il est nécessaire, mais aussi du remerciement pour qu’un client ressente les égards que lui accorde une marque, quel meilleur exemple en la matière pour Loubna Hajji que l’expérience concrète qu’a traversée la BMCI, il y a quelques mois, pendant la transformation digitale de la banque. «Cette phase s’est accompagnée de plusieurs bugs informatiques, qui ont entraîné une grande insatisfaction des clients.
Elle a même été vécue difficilement par les collaborateurs», détaille, sans langue de bois, la Directrice Marketing Innovation et Digital. Deux options étaient possibles, explique la responsable: soit feindre que tout va bien ou affronter le problème. «Nous avons invité des clients pour régler leurs problèmes mais aussi pour écouter leurs attentes avec humilité. Car un client a besoin d’être écouté, compris et d’être partie prenante à la démarche de construction», explique-t-elle. L’expérience s’est avérée fructueuse et édifiante, car «cela nous a permis de nous dire que nous nous trompions peut-être de stratégie et d’ajuster donc en conséquent nos actions», ajoute Loubna Hajji. Ensuite, lorsque des plans d’action sont mis en place et sont respectés, les retombées ne peuvent qu’être positives, défend l’experte. Maintenant, une entreprise doit-elle se sentir redevable envers les consommateurs d’avoir été au rendez-vous au pic de la crise ?
Pour Driss Feddoul, l’un des fondamentaux d’une relation client réussie et d’une stratégie de fidélisation qui se veut efficace, c’est d’abord de considérer le client comme un partenaire. «Cela implique de fonder avec lui une relation forte, durable et basée sur la confiance», explique-t-il. Et d’indiquer que le remerciement est une composante de l’ensemble des prérequis qui commence d’abord par la confiance et se traduit sur le terrain par la transparence et l’écoute. De plus, le client peut être invité à recommander la marque et à en être les prescripteurs. Capitalisant sur sa connaissance du secteur des télécommunications, où les stratégies de fidélisation ont été rodées depuis plusieurs années au Maroc, Zineb Tadili commente: «Le remerciement du client peut souvent être rattaché au fait de lui offrir une contrepartie de sa fidélité. Cette tendance est vraie, quoiqu’un peu moins déployée aujourd’hui, dans le sens où, de nos jours, un client préfèrerait une proximité continue et un service efficace dans la durée à des avantages ponctuels non accompagnés par des suivis rapprochés de ses attentes». D’ailleurs, dans le cas des contrats d’adhésion par exemple, un client peut être capable de résilier son abonnement sans couacs et en toute fluidité, affirme Tadili.
Gestion de la relation client. Contact humain vs chatbox, une question d’efficacité
De plus en plus de marques communiquent, ou du moins renforcent leur service client, par la mise en place des mécanismes de chatbox, ces boîtes de messagerie pré-programmées et intelligentes qui sont déployées pour informer, rassurer ou recevoir les doléances des consommateurs. Bonne ou mauvaise méthode ? Que préfère le client ? Le Directeur associé de Elu service client de l’année Maroc, indique que «selon nos données, le face à face reste essentiel, dans une relation client, et le téléphone revient aussi en force».
Cet état de fait renvoie à la préoccupation de savoir si c’est une question d’insatisfaction vis-à-vis des autres canaux digitaux, car le client tient au triptyque “réponse, prise en charge et suivi a posteriori”, détaille l’invité du Cercle des ÉCO. Le plus important pour un client est d’avoir une réponse et le recours est de plus en plus grand au canaux digitaux, nuance de son côté Loubna Hajji. «Dans le domaine bancaire, par exemple, un client voudrait bien avoir un parcours full digital et n’avoir à se déplacer en agence qu’en cas d’extrême nécessité, commente-t-elle. L’efficacité de l’offre de service client détermine le choix de ce dernier en faveur de tel ou de tel autre canal, défend Feddoul, expliquant que l’effet de surprise qui peut en découler est à même de renforcer le sentiment d’attachement et donc de susciter la fidélité.
Communication d’entreprises. Comment choisir les « bons messages » ?
La satisfaction de la clientèle et l’élargissement de la communauté de consommateurs ont une portée cruciale pour l’image d’une marque et de son capital sympathie sur le marché. C’est pour cela que chaque entreprise doit accorder un grand intérêt aux messages formulés, directement ou indirectement, à l’égard de ses consommateurs. Tout l’enjeu reste donc de bien choisir ces messages. Les invités étaient tous d’accord sur le fait que certains critères clés doivent être observés par l’entreprise. «Le bon message est celui qui va exprimer une vérité. Le besoin n’est pas de communiquer sur la tarification ou sur le volume de la cible ou autres.
Aujourd’hui, c’est l’expérience client et l’offre innovante qui font la différence». Loubna Hajji, Directrice Marketing, Innovation et Digital de la BMCI, plante le décor en matière de conception de stratégie d’entreprises, pour dire qu’une marque ne peut désormais plus véhiculer un message à la masse. «Il faut cibler et personnaliser sa communication, selon les appétences des clients et les canaux qu’ils privilégient selon leur catégorie», souligne-t-elle.
Driss Feddoul, le Directeur du Pôle commercial, marketing et communication externe chez Wafasalaf, voit dans les nouveautés réglementaires une véritable opportunité, car «le législateur a mis de l’ordre dans la manière de communiquer avec les clients, qu’il s’agisse de la protection du consommateur, de ses données ou aussi des normes à respecter dans le domaine publicitaire».
En gros, une stratégie de marketing axée sur la fidélisation doit prendre en compte une série de critères, reposant avant tout sur une connaissance assez pertinente du client dans son environnement. «Jusqu’à très récemment, les entreprises étaient assez nombrilistes dans leur approche, s’appuyant surtout sur les quatre « P » de Kotler & Dubois. La donne a changé, car le client est devenu le premier centre d’intérêt d’une stratégie et sa première cible», insiste de son côté Zineb Tadili, Directrice Costumer & shopper expérience chez Orange. Et d’expliquer que l’ingrédient-clé ici est la segmentation des clients, pour ensuite exprimer un message et une tonalité dédiés à chaque tranche de cette cible.
Stratégies de fidélisation. La logique de “communauté” est-elle efficace ?
Dans certains secteurs, une marque parvient à créer une communauté “réelle”. Il s’agit d’une tranche de consommateurs fidèle à la marque, qui adhère et arbore ses valeurs, mais qui aussi la défend et la conseille. La force de frappe de cette communauté est-elle conséquente. La logique de “communauté” est-elle efficace ?
A ce propos, Loubna Hajji nuance : «si dans certaines branches d’activités, c’est la marque qui est derrière la naissance de cette communauté, dans d’autres secteurs, en revanche, celle-ci se constitue d’elle-même et promeut la marque». Ceci est considéré comme un signe fort de réussite de la stratégie de l’entreprise, commente l’experte, car la promotion se trouve portée par ces clients fidèles dopant ainsi la croissance de la marque. La Directrice en charge de la Costumer & shopper expérience chez Orange insiste, de son côté, que la portée de cette communauté est très positive mais peut également être très lourde lorsqu’il s’agit de communauté de détracteurs. D’où l’importance, recommande-t-elle, d’accorder tout autant d’intérêt à la communauté de fidèles clients qu’à celle des insatisfaits. Plus encore, c’est un élément de mesure crucial de la pertinence d’une stratégie, abondent les quatre invités.